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But (Art. 1)

Compte tenu de l’expérience relativement brève dans le temps (30ans) dont on dispose en Suisse et de l’origine étrangère du concept de l’Ombudsman, il est utile de définir dans un article de base la fonction principale d’un bureau de médiation parlementaire. De manière générale, il doit(dans le cadre des compétences qui lui sont attribuées) renforcer les liens de confiance entre la population et les institutions du canton et/ou des communes et prévenir le mécontentement que peut susciter l’action étatique. C’est le cahier des charges qui indique les voies par lesquelles le médiateur atteint son objectif principal.

Tâches (Art. 2)

Pour résumer à l’extrême les tâches du médiateur, on peut dire qu’il examine, conseille et concilie.

Examiner

Les institutions de l’Ombudsman ont acquis leur notoriété en tant que bureaux chargés de recevoir, à un niveau accessible, les plaintes de la population contre l’administration publique. En examinant ces plaintes sans parti pris et en toute indépendance, le bureau de médiation exerce la fonction d’un agent de contrôle de l’administration. Contrairement aux tribunaux ou aux instances de recours publiques , qui remplissent cette même tâche par le biais de procédures délimitées par des délais et de décisions exécutoires, la compétence cognitive des médiateurs va beaucoup plus loin en ce sens qu’elle peut aussi porter sur des décisions exécutoires de l’administration, mais qu’elle se termine par une médiation ou par une recommandation du bureau de médiation. Ainsi, le médiateur doit examiner si les services administratifs entrant dans sa sphère d’activité procèdent conformément aux normes juridiques en vigueur et selon les règles de l’équité. Il y a toujours des situations litigieuses qui ne peuvent pas être résolues de façon satisfaisante si l’on applique les normes en vigueur et qui supposent que le médiateur soit interpellé pour amener une solution équitable qui satisfasse toutes les parties intéressées. L’administration, elle aussi, prend souvent des décisions en équité. Alors que par la voie de la procédure ordinaire on peut uniquement faire valoir que l’administration n’a pas été assez loin ou qu’elle a été trop loin dans son appréciation, le bureau de médiation a un pouvoir d’examen illimité. Ainsi, il peut, même en restant dans le cadre du pouvoir d’appréciation de l’administration, préconiser, dans un cas d’espèce, une solution plus proche du citoyen ou une modification de la pratique correspondante. Enfin, le bureau de médiation peut aussi examiner de près si l’administration a agi de façon correcte et opportune (p. ex. si les citoyennes et citoyens ne reçoivent pas de l’administration une réponse à leurs lettre, si la durée de traitement des dossiers est d’une longueur intolérable ou si les fonctionnaires se comportent de façon impolie) et faire des propositions pour des réglementations futures et des changements législatifs.

Dans un grand nombre d’affaires (selon les données chiffrées valables pour le canton de Bâle-Ville, il s’agirait environ du 50% de toutes les plaintes), le médiateur arrive à la conclusion que le service administratif concerné a agi conformément à la loi et de façon correcte, ce qui protège l’administration de reproches infondés émanant de la population.

Les résultats des examens du médiateur sont reconnus à une large échelle autant par la population que par l’administration. Cela est lié très directement au crédit, à la compétence professionnelle, à l’indépendance et à l’intégrité du médiateur.

Conseiller

Les qualités susmentionnées prédestinent le médiateur également à la fonction de conseiller. En effet, de plus en plus un fossé se creuse entre les services spécialisés de l’administration, qui ont de grandes connaissances techniques, et les administrés non-initiés, qui sont dans l’incapacité d’apprécier ou même d’exécuter les décisions de ces services (ainsi, p. ex. dans les domaines de l’assurance sociale ou ceux de la santé publique). De cas en cas, le bureau de médiation doit aussi expliciter et commenter des décisions de l’administration (parfois même les jugements des tribunaux).

Concilier

Souvent, en complément à la procédure d’examen, le médiateur tente de proposer une solution équitable, conciliatrice dans le cadre de ce que l’on appelle une procédure de médiation complémentaire (voir Steiner/Nabholz,Ombuds-Mediation, Schulthess-Verlag Zürich, 2003, p. 65 ss).

Un bureau de médiation connu et reconnu par la population a finalement un effet préventif non négligeable sur l’activité de l’administration rien que du fait de sa simple existence, par la manière dont certaines affaires sont instruites et par la publication de cas de la pratique dans le rapport annuel ou aussi par la formation donnée à certains services de l’administration.

Relations publiques

Tout bureau de médiation doit aussi soigner les relations publiques. Une institution Ombudsman inconnue n’est utile à personne. Bien au contraire, le degré de notoriété donne au bureau de médiation la considération voulue et à sa voix le poids nécessaire ; ainsi il a la force de s’imposer. Les moyens et les voies pour obtenir ce résultat sont variés (voir aussi infra ch. 9 ad art. 14 al. 4).

Les tâches de relations publiques du médiateur en Suisse et à l’étranger sont une partie non négligeable de son activité. Elles sont un des moyens de persuasion et d’aide des plus importants, car elles permettent de mettre en évidence les forces et les faiblesses de l’activité publique. Les relations publiques peuvent avoir des effets préventifs et positifs. L’information du public sur l’activité du médiateur et les relations entre les administrés et les autorités se font, dans la règle, par le biais de manifestations publiques, de conférences et surtout du rapport d’activité annuel.

Sphère d’activité (Art. 3)

La sphère d’activité sera toujours l’objet d’interprétation, car l’administration publique subit des modifications permanentes de structure. Pour permettre une meilleure interprétation, il est opportun de reprendre dans la loi une définition positive et une définition négative. Font partie de la délimitation positive l’exécutif (gouvernement cantonal et/ou municipalité), y compris tous les services publics, le cas échéant, même au niveau du district. On peut se demander – et c’est fondamental – dans quelle mesure la loi elle-même doit résoudre les problèmes liés à la délimitation et dans quelle mesure les travaux législatifs peuvent faciliter l’interprétation. Deux tendances fondamentales existent pour les bureaux de médiation parlementaires : partout où les citoyennes et citoyens ont été impliqués dans une procédure administrative, le bureau de médiation doit pouvoir intervenir afin d’obtenir une conciliation ; mais il ne doit jamais pouvoir porter une appréciation sur la jurisprudence stricto sensu. Ces deux aspects fondamentaux permettent d’avoir plus de clarté en ce qui concerne les formes mixtes. Ainsi, des administrations comme les offices de poursuite ou un office successoral sont, en partie et pour des raisons historiques, bien soumises à la juridiction des tribunaux qui exercent une surveillance juridique, mais matériellement on devrait les considérer comme faisant partie de l’administration publique. A l’inverse, il y a des autorités dans l’administration publique qui ne sont pas un tribunal au sens de la CEDH, mais qui exercent des tâches de nature juridictionnelle (tribunal de police à Zurich, autorité de recours en matière de construction, autorité de recours en matière fiscale etc.).

A part cela, il s’agit de trouver soit dans la loi soit dans les travaux législatifs des réponses aux questions suivantes liées à la sphère d’activité du médiateur. De quelle sphère d’activité relèvent les institutions intercantonales, resp. intercommunales (instituées par des concordats ou organisées en tant qu’associations intercommunales), comme, p. ex., les hautes écoles professionnelles ou l’office de la circulation des deux Bâle etc.Est-ce que les institutions de droit public dépendantes/indépendantes (établissements de droit public ou fondations, comme, p. ex., l’assurance cantonale des immeubles, la caisse cantonale de compensation AVS, la banque cantonale, la Bibliothèque cantonale de Zurich, la Caisse maladie publique de Bâle-Ville) entrent dans la sphère d’activité du médiateur ? Qu’en est-il des institutions privatisées (SA dont les actions appartiennent totalement ou en majorité à une corporation locale ou à l’Etat, comme, p. ex., l’Aéroport de Zurich, les usines communales de l’électricité, du gaz et des eaux, le Restaurant Löwen AG etc.) et des institutions de droit privé qui exercent des tâches d’ordre public et qui sont subventionnées par les impôts (p. ex. la Coopérative du théâtre et l’Académie de musique à Bâle, les associations s’occupant de crèches, le organisations de droit privé qui agissent sur mandat de l’Etat et dans le cadre de conventions de prestations etc.)?

Font partie de la définition négative de la sphère d’activité le pouvoir législatif (déjà en tant qu’autorité électorale) de même que les services de l’administration publique qui sont chargés d’élaborer des ordonnances à force obligatoire générale. Il faut aussi exclure de la sphère d’activité toutes les autorités qui bénéficient d’une indépendance juridictionnelle dans la mesure où il ne s’agit pas de l’administration des tribunaux (déni de justice, retard dans l’administration de la justice, notification d’actes judiciaires etc.). Le législateur (resp. l’autorité édictant des ordonnances) devra enfin décider s’il veut exclure ou non de la sphère d’activité les institution ayant des activités d’ordre purement économique ou d’ordre ecclésiastique, telles les études de notaires ou la banque cantonale ou les églises de droit public et les communautés religieuses reconnues. Dans la législation suisse existante, il y a à ce sujet différentes réglementations. Il faut aussi déterminer si les employés de l’administration publique peuvent s’adresser au bureau de médiation en cas de conflit avec leur employeur (canton ou commune). L’expérience montre que de telles réclamations internes à l’administration représentent 10 à 30% des dossiers d’un bureau de médiation. Tous les bureaux de médiation parlementaires existants actuellement sont compétents pour examiner ces situations litigieuses importantes qui supposent souvent un grand engagement et sont fort délicates (questions de droit du travail concernant le salaire/les vacances/les congés, le temps de travail, mais aussi le mobbing, les faiblesses dans la conduite du personnel, les résiliations, les mesures disciplinaires etc.). La compétence établie par une longue pratique correspond à une norme attributive non écrite. Une réglementation législative explicite de cette compétence se justifie notamment par l’effet préventif important qu’implique l’examen de réclamations internes à l’administration et l’activité de conseil correspondante.

Dans tout le monde, les parlements se demandent comment des employés de l’administration peuvent être légalement protégés contre des mesures de rétorsion, si, au cours de leur activité, ils constatent des abus et veulent les rendre publics (on parle de whistle blowers). Les bureaux de médiation sont particulièrement qualifiés pour recevoir et examiner de telles requêtes, par ce que, d’une part, ils assurent la compétence technique nécessaire, la diligence et la discrétion, et parce que, d’autre part, ils ouvrent les enquêtes de leur propre initiative et garantissent ainsi l’anonymat voulu aux employés de l’administration, auteurs de la dénonciation. Finalement, il faut aussi se demander qui peut s’adresser au bureau de médiation. Il ne fait aucun doute qu’il s’agit de tous les administrés qui sont pris dans un conflit ou des difficultés avec un service public, peu importe leur âge, leur domicile ou leur nationalité, peu importe qu’ils soient libres ou en captivité. Même des personnes juridiques (associations, corporations, fondations, entreprises) peuvent s’adresser au bureau de médiation. Les services de l’administration publique, en revanche, qui sont en conflit avec les citoyennes et citoyens, ne peuvent pas s’adresser au bureau de médiation en vue d’une conciliation sans le consentement de la personne privée. Les citoyennes et citoyens peuvent décider librement s’ils veulent avoir recours au bureau de médiation et dans quelle mesure ils veulent participer activement à la procédure de médiation, alors que l’administration publique est obligée ar la loi de donner, sur demande, accès à ses dossiers au bureau de médiation , de donner des renseignements et de permettre des inspections sur place.

Introduction (Art. 4)

Le bureau de médiation doit, d’une part, pouvoir aborder de façon créative et flexible les demandes très variées de la population et ne doit donc pas être inutilement freiné dans son action par des règles de procédure. D’autre, part, les règles de procédure ont toujours pour objet de protéger la personne impliquée. Comme le bureau de médiation ne peut pas rendre de décisions ou donner des instructions ayant force obligatoire et doit, en plus, avoir une activité conforme à la loi et à l’équité, il ne peut, par principe, pas porter atteinte aux droits de la personne impliquée ou limiter ses droits ; il n’a donc pas besoin de règles de procédure. La loi doit, cependant, aussi prévoir que le médiateur peut engager une enquête non seulement à la suite d’une requête, mais même de sa propre initiative. Il y a des cas d’application. Ainsi, le bureau de médiation peut engager une enquête de sa propre initiative à la suite d’annonces dans les médias ou s’il s’agit de protéger des informateurs qui craignent des mesures inévitables de rétorsion. Pour les protéger de demandes formulées par la population de façon légère ou chicanière, la loi doit autoriser explicitement le médiateur à décider s’il veut examiner une affaire et dans quelle mesure. De même, la loi doit prévoir que les bureaux de médiation peuvent aussi s’occuper d’une affaire en cours ou qui est terminée sur le plan juridique. Il n’est pas rare que des citoyennes et citoyens attendent que des décisions administratives deviennent exécutoires, que ce soit dû à de l’ignorance ou à des lacunes sur le plan des connaissances linguistiques, sur le plan des délais ou sur les plan des moyens financiers ; ils ne développent que peu à peu ou à la suite d’informations données par des tiers des sentiments de frustration et de colère en ce qui concerne la décision de l’administration soit-disant injuste.

Dans la procédure de médiation, le fait que le médiateur entende personnellement le requérant a une signification exceptionnelle.

Examen de la requête (Art. 5)

Le principe de l’opportunité suppose que le bureau de médiation décide s’il examine une affaire ou non. Selon quels critères renonce-t-il a un examen plus approfondi ?

Le bureau de médiation renoncera notamment à un examen si les requérants ne font valoir dans leur demande aucun intérêt ni d’ordre personnel ni d’ordre public ou ne se réfèrent pas à une intervention déterminée de l’administration qui permet de supposer qu’ils sont intéressés par un examen et qui démontre l’importance de cet intérêt. On admet aussi que l’on peut renoncer à des examens si le bureau de médiation considère qu’une affaire n’est pas assez importante pour justifier un examen. S’il refuse, pour ce motif, un examen, le médiateur est lié par le principe de la proportionnalité en ce qui concerne les moyens engagés. Les cas bagatelles ne doivent pas engager le médiateur dans des opérations intenses sur le plan du travail et dans des enquêtes coûteuses en temps. Ce qui peut sembler sans grande portée pour des tiers, peut néanmoins revêtir une grande importance pour la personne concernée. C’est pourquoi, chaque cas particulier doit permettre de savoir si le médiateur va user de son droit de refus ou non. Le bureau de médiation pourra enfin renoncer à l’examen d’une affaire si le requérant s’adresse à lui de façon légère ou quérulante. Le bureau de médiation doit contribuer à renforcer les rapports de confiance entre les citoyennes et citoyens et l’administration publique ; il n’est donc pas possible d’appuyer une requête contraire aux règles de la bonne foi. Les requérants doivent avoir la volonté de collaborer dans toute la mesure acceptable avec le bureau de médiation dans l’affaire qui les concerne. Le bureau de médiation ne doit pas entrer en matière quand une requête est anonyme. Le bureau de médiation peut cependant examiner des requêtes, même de personnes quérulantes, quand une audition et une médiation consécutive permettront, selon toute vraisemblance, de désamorcer un conflit.

Si le bureau de médiation décide de ne pas se saisir d’une requête, cela ne signifie pas pour autant qu’elle est mise simplement aux archives. Les requérants doivent être informés de la décision. Le principe de l’équité exige que le bureau de médiation informe les requérants quand il n’est pas disposé ou pas en mesure d’examiner une affaire.

Le principe de l’opportunité ancré ici garantit finalement la flexibilité nécessaire dans les procédures en cours. Le médiateur devra décider, de cas en cas, quels services utiles il peut proposer si une procédure administrative ou judiciaire est déjà engagée. Le recours au bureau de médiation ne doit pas retarder ou alourdir les procédures en cours. Dans certains cas particuliers, le bureau de médiation peut cependant tempérer les litiges ou contribuer à atténuer les frustrations, notamment en commentant, p. ex., la procédure en cours, en rendant plus intelligibles les instructions et décisions ou en explicitant les différentes phases que comporte la procédure administrative. Les décisions auxquelles aboutit la procédure n’en sont pas pour autant touchées. Il en va de même pour la question de savoir si une procédure doit être suspendue provisoirement pour permettre une discussion avec le bureau de médiation en vue d’une éventuelle conciliation : la décision appartient uniquement à l’autorité qui mène la procédure.

Critères d’appréciation (Art. 6)

Le bureau de médiation dispose de possibilités d’appréciation particulièrement grandes en ce sens qu’il peut examiner les relations de l’administration publique avec des personnesnaturelles et juridiques selon les notions des critères de droit, de l’opportunité et de l’équité.

La notion des critères de droit est un peu moins étroite que celle de la légalité. Elle rappelle que, dans l’exercice de leur activité, les autorités sont subordonnées à l’ordre juridique. L’examen de l’opportunité incombe presque par essence au bureau de médiation, qui est un organe indépendant de l’administration. Ce critère lui permet de vérifier que parmi plusieurs solutions, toutes également légales, que l’administration pouvait indifféremment choisir en vertu de son pouvoir d’appréciation, elle a préféré la meilleure.

Quant à l’équité, elle signifie que toutes les formes de l’activité de l’Etat, notamment les actes matériels (également dits actes informels ou action administrative de fait), doivent être mesurées en fonction des effets qu’elles impliquent pour les intéressés. Les décisions rendues en équité prennent en considération les particularités du cas d’espèce. Elles tiennent compte de toutes les circonstances importantes qui l’entourent et ont pour objet une situation individuelle et concrète. Elles doivent être objectives et rendues avec diligence. La notion d’équité comprend l’appréciation de la qualité des relations avec les usagers (esprit client) qui peut conduire le médiateur à s’exprimer sur le comportement d’un service de l’administration.

Si ces critères d’appréciations peuvent paraître excéder le pouvoir d’appréciation de toute autorité administrative, cette ouverture est largement tempérée par le fait que le médiateur n’a pas la compétence de rendre des décisions, mais seulement de faire des propositions aux parties concernées.

Moyens d’appréciation et devoirs de collaboration (Art. 7 und 9)

Lorsqu’il examine une affaire, le bureau de médiation est tributaire du concours à la fois du requérant et du service administratif concerné. Il a, parfois, également besoin de l’appui de l’autorité à laquelle ce service est directement subordonné ou d’une autorité cantonale ou communale, ou encore – à titre exceptionnel – de celui d’un tiers non impliqué dans l’affaire. Le bureau de médiation dispose d’un droit non limité d’exiger des informations.

Il a ainsi le droit d’exiger des renseignements écrits et oraux ainsi que la production de documents originaux à l’appui de ces renseignements.En outre, le bureau de médiation peut procéder à des inspections dans le but de se faire une idée plus précise de l’affaire.

Les services de l’administration ont l’obligation de collaborer à l’élucidation des faits. A cette fin, ils doivent fournir au médiateur toutes les informations dont il a besoin, lui remettre les documents originaux demandés ou encore l’autoriser à procéder aux inspections nécessaires. Les autorités ne peuvent se soustraire à cette obligation en invoquant la confidentialité ou le caractère secret des données.

Résultats de l’examen (Art. 8)

Lorsqu’il examine une affaire, le médiateur se doit d’adopter une position neutre et non partisane, à l’instar du juge dans le cadre d’un procès. Il doit se faire une idée de la situation soumise à son pouvoir d’examen. Ce n’est qu’une fois qu’il aura élucidé les faits, qu’il pourra se forger une opinion. Il doit entendre le requérant et l’autorité concernée avant de leur soumettre des propositions de transaction ou de leur adresser une recommandation. Lorsqu’il fini d’examiner une affaire, le médiateur informe le requérant du résultat de l’examen. Il le fait également lorsqu’il parvient à la conclusion que la procédure ou la décision contestée n’est ni illicite, ni inopportune, ni inéquitable. En pareille occurrence, il peut approuver le comportement du service administratif en cause et écarter les griefs infondés. L’information sur le résultat de l’examen est assurée de manière informelle. Lorsque le médiateur en a fini avec l’examen d’une affaire, il doit, en tout état de cause, en informer l’autorité concernée. Dans l’état actuel de la pratique suisse, on part, en général, de l’idée qu’un médiateur n’a pas la compétence de rendre des décisions ni de donner des instructions à un service administratif.

Dans les affaires qui en sont au point mort et lors de conflits entre des personnes naturelles et juridiques et des services de l’administration, le médiateur doit concilier les points de vue et, le cas échéant, montrer les voies qui permettent de trouver une solution. Cela pourra se faire souvent grâce à des discussions. Beaucoup de conflits sont dus, en réalité, à des difficultés dans la communication entre les citoyennes et citoyens et les représentants des autorités. Dans ces cas, une activité de médiation, qui donne aux parties impliquées l’occasion d’échanger leurs points de vue dans un climat de confiance et avec l’aide d’un médiateur professionnel, permet d’éviter de nombreux conflits.

Si les tentatives de conciliation du médiateur n’aboutissent à aucun résultat, le médiateur adresse aux parties une recommandation, qui revêt, en général, la forme écrite et qui indique quelle sera la suite de la procédure. Le médiateur peut informer d’autres autorités, notamment les autorités de surveillance ; il peut même s’adresser au public. L’information du public dans un cas particulier doit cependant rester l’exception. On peut concevoir une telle information notamment quand une affaire fait l’objet de controverses dans le public et que le rapport d’examen du bureau de médiation pourrait clarifier l’affaire et réduire les émotions et les craintes.

Quand le médiateur transmet à des tiers son appréciation et sa conclusion, il doit veiller à respecter les secrets de fonction et les secrets d’affaires qui lui sont confiés ainsi que les intérêts publics et privés dignes de protection. Dans les cas où il n’est pas nécessaire de communiquer des données personnelles, les indications personnelles transmises par les requérants doivent rester anonymes

Secret de fonction, secret professionnel et secret d’affaires et droit de refuser de témoigner (Art. 16)

Le bureau de médiation se trouve dans une situation spéciale et délicate qui suppose à la fois la transparence et la discrétion. Le médiateur a bien libre accès à tous les dossiers de l’administration, mais il est soumis, ainsi que tous ses collaboratrices et collaborateurs, au secret de fonction et cela dans la même mesure que les services de l’administration qui donnent des renseignements. C’est pourquoi, les requérants ne peuvent pas consulter de façon illimitée leur dossier chez le médiateur, resp. en demander des copies. D’autre part, les requérants aussi peuvent exiger du bureau de médiation que leur affaire soit traitée de façon confidentielle. Cela joue un rôle important, notamment dans le domaine du conseil, plus particulièrement s’il s’agit d’affaires internes de l’administration (conflits entre fonctionnaires sur le lieu de travail). Inversément, le bureau de médiation doit pouvoir établir un rapport public sur son activité et, le cas échéant, rendre public des abus. Les médiateurs parlementaires donnent ainsi régulièrement connaissance au public dans leurs rapports annuels et compte rendus des cas relevant de leur pratique, en veillant à sauvegarder l’anonymat des requérants ; ils doivent moins veiller à sauvegarder l’anonymat des services administratifs critiqués. Des problèmes de confidentialité se posent aussi dans les rapports entre le parlement et le bureau de médiation. C’est pourquoi, il est opportun d’introduire dans la loi une disposition qui prévoit que le parlement – on rappelle qu’il est l’autorité d’élection et le destinataire du rapport d’activité – n’a pas, dans les cas particuliers, le droit de contrôler l’activité du médiateur. Si des requérants insatisfaits déposent une plainte auprès du parlement, le bureau de médiation peut tout au plus être invité à prendre position.

Le secret de fonction reconnu aux médiateurs en tant que personnes de confiance implique le droit de refuser de témoigner dans des procédures administratives, civiles et pénales si les médiateurs ont connaissance de certains faits dans l’exercice de leur fonction et que les parties intéressées ne lesont pas déliés du secret de fonction.

Election (Art. 11, 12)

L’indépendance du médiateur par rapport à l’administration publique est d’une importance centrale. C’est pourquoi il est élu par le parlement. Le médiateur doit rendre compte de son activité à la représentation du peuple. En tant que personne de confiance et de médiation entre la population et les autorités, il doit être une personnalité d’une probité absolue, respectée et connue pour sa capacité d’intégration. Pour souligner cette position digne de confiance, la loi peut prévoir que l’élection du médiateur se fait à la majorité qualifiée (p. ex. la majorité absolue des membres du conseil). Compte tenu de la personnalité du médiateur et, malgré tout, de l’autonomie dont il bénéficie dans l’accomplissement de ses tâches, on se demande – la question est controversée – si une seule personnalité peut être élue, à chaque fois, ou si la loi peut aussi prévoir l’élection de deux personnes qui se partagent la tâche. Dans les deux hypothèses, cependant, l’élection devrait porter sur une période fixe de quatre à six ans, si possible en alternance avec les élections du gouvernement et du parlement.

La loi doit aussi prévoir certaines conditions d’éligibilité ou des incompatibilités en ce qui concerne les candidates et candidats. Ainsi, il est évident que le médiateur ne doit pas effectuer une autre tâche publique à côté de son activité, qu’il ne doit pas occuper une position dirigeante au sein d’un parti politique ou, de façon générale, qu’il ne doit pas exercer une activité privée ou publique qui serait incompatible avec sa fonction.

Statut (Art. 14)

La loi doit prévoir que le médiateur bénéficie d’une indépendance qui ne peut pas lui être retirée et qui est garantie par différentes modalités. Ainsi, l’art. 6 al. 1 de l’avant-projet de Loi Fédérale sur le Bureau fédéral de médiation du 4 juillet 2003 prévoit explicitement : « le médiateur est indépendant dans l’accomplissement de ses tâches. Il est évident que personne ne peut donner au bureau de médiation des mandats à caractère obligatoire, qu’il s’agisse du parlement, du gouvernement ou des requérants eux-mêmes. C’est pourquoi l’art. 14 al. 2 dispose que le parlement ne peut exercer que la surveillance supérieure sur le médiateur. C’est pourquoi aussi, sur le plan fédéral, il est prévu que la surveillance du parlement (commissions de gestion) se limite à contrôler que le médiateur accomplisse ses tâches (voir art. 13 et Rapport explicatif, p. 19 i.f.).

Le niveau élevé de confiance dont doit jouir le médiateur explique que sa rémunération doit être d’un niveau correspondant. Le médiateur devrait donc gagner au moins autant que les cadres les mieux rémunérés de l’administration ou que les présidents du tribunal de la circonscription dont relève cette administration. Il ne faut pas perdre de vue que la rémunération du médiateur correspond à la considération dont il doit jouir et à l’autorité dont il doit faire preuve par rapport à l’administration publique.

La loi peut aussi prévoir où se trouve le siège du bureau de médiation, mais le médiateur doit pouvoir choisir lui-même son domicile au sens propre du terme. Le bureau de médiation fixe aussi lui-même son budget et il doit le soumettre au parlement pour approbation. De plus, c’est le médiateur qui choisit et engage le personnel du secrétariat, et non pas une autre autorité.

Gratuité (Art. 10)

Partout dans le monde, le recours aux bons offices du médiateur est gratuit. La gratuité est, en fait, devenue le trait caractéristique des médiateurs. Le prélèvement de frais de procédure serait un obstacle non négligeable qui pourrait dissuader les personnes intéressées de s’adresser à un bureau de médiation. Or cela compromettrait, dès le début, le sens et le but d’un bureau de médiation.

Rapport d’activité (Art. 14 Abs. 3)

Le bureau de médiation répond de son activité devant le parlement et doit lui soumettre un rapport d’activité. Cet instrument est important d’autant plus que, selon la pratique suisse, le médiateur ne peut qu’émettre des recommandations, mais qu’il n’a pas la compétence de rendre des décisions ni de donner des instructions. Ce document présentera chaque cas traité dans les détails et avec toute la clarté voulue, de telle sorte que les autorités concernées puissent en faire bon usage. Le médiateur citera nommément les autorités incriminées. Il prendra soin de respecter la personnalité des personnes physiques ou morales, ainsi que celle des personnes agissant au nom des autorités et se conformera d’une manière générale aux règles de la protection des données et de la personnalité. Les propositions de réforme peuvent porter sur l’adoption ou la modification de textes normatifs aussi bien que sur l’organisation de l’administration.

Dans des cas particuliers, par exemple lorsque l’information du public sur une affaire importante s’avère urgente et ne peut attendre la publication du rapport annuel, le bureau de médiation a la possibilité de rédiger et de publier un rapport particulier.

Information des autorités, de l’administration et du public (Art. 14 Abs. 4)

Les médiateurs n’adressent leurs compte rendus annuels non seulement au parlement, mais aussi aux autorités, à l’administration et aux médias ; dans ce dernier cas, la remise du rapport est parfois accompagnée d’une conférence de presse. Des papillons peuvent non seulement être édités et annexés aux missives du bureau de médiation, mais aussi être envoyés à divers services sociaux, être déposés auprès des services de consultation juridique, de l’administration ou des postes de police ou être distribués lors de conférences que tous les médiateurs sont invités à faire de temps à autre. Certains médiateurs rapportent périodiquement sur leur activité dans un article de presse ou à la radio ; ils le font même régulièrement au cours d’émissions de télévision, comme en Autriche (« un cas pour l’avocat généraliste »). L’expérience montre cependant qu’un travail efficace et accompli se fait dans le silence et la discrétion. Quand le médiateur s’adresse, dans un cas concret, aux médias, il recourt à l’ultime et le plus délicat moyen permettant de mettre en évidence un abus.

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